Actuellement en panne d'inspiration, je me permets de voler à Frederic Bezies une idée d'article. Ce dernier, utilisateur d'Archlinux depuis 14 ans, se demande vers quelle distribution il se tournerait si le projet venait à fermer. Je vais donc refaire le même exercice de pensée en version Debian car c'est mon système d'exploitation fétiche.
Utilisateur sérieux de Linux depuis 2006, je suis passé à peu près par toutes les grosses distributions : Ubuntu, Debian, Gentoo, Fedora, openSUSE, Arch, Manjaro, et même Mandriva (du temps où elle existait). Et pour les serveurs je pourrais rajouter NixOS. La seule "grosse" distribution que je n'ai jamais testé est Slackware. Et après toutes ces années d'errance, je me suis enfin stabilisé sur Debian.
Je ne dirais pas que Debian est la meilleure distribution Linux du monde car cette notion est très subjective, mais elle est de loin ma préférée. Les raisons ? Elle est simple, versatile, bien documentée avec une grosse communauté derrière. Et surtout elle ne repose pas sur une entreprise, il n'y a aucun risque de la voir rachetée du jour au lendemain par une grosse corporation. Debian est également réputée comme extrêmement stable, ennuyeuse et prévisible, dans le bon sens du terme.
Je sais que de nombreux utilisateurs reprochent à Debian de fournir des versions anciennes voire obsolètes de certains paquets mais personnellement ce n'est pas un problème. Étant utilisateur de MATE, l'environnement évolue peu et se bonifie comme du bon vin au fil des années, il n'y a pas de nouveauté clinquante tous les 6 mois. Idem pour Firefox, la cuvée ESR me convient très bien. Et quant aux logiciels tiers comme GIMP, LibreOffice, VLC, Thunderbird... je n'ai pas besoin de la dernière version. Et dans les rares cas où j'ai besoin d'un truc neuf je peux utiliser les backports, un dépôt tier, appimage, flatpak... il existe de nombreuses solutions.
Tout ça c'est bien joli, mais ça ne répond pas à la question suivante: quelle distribution pour remplacer Debian, si cette dernière venait à s'arrêter ? Je précise que je parts du principe que toutes les dérivées telles que Ubuntu s'arrêteraient aussi, basiquement il n'y aurait plus rien basé sur les paquets .deb.
- Vous l'aurez compris en lisant cet article, je ne cherche pas de distribution en rolling release, ce qui élimine donc la famille Archlinux.
- La Red Hat family (Rocky, Alma) semble toute indiquée, malheureusement elle est aux mains d'IBM qui s'est montré hostile vis à vis de la gratuité des distributions. Donc non.
- openSUSE Leap est un bon choix. Étant synchronisée sur la SLES (la version payante) elle est également stable et ennuyeuse. Les deux seuls problèmes que je vois sont la dépendance à une entreprise (bien que cette dernière ne soit pas hostile à sa communauté) et YaST dont je ne comprends pas l'utilité, à part rassurer les Windowsiens.
- Alternativement... Mageia. Je dis habituellement beaucoup de mal de cette distribution car elle n'a pas évolué depuis Mandrake, et qu'elle souffre d'un manque flagrant de moyens humains et financiers.
En conclusion, si je devais remplacer Debian, je partirais vers openSUSE ou Mageia. Et vous, que choisiriez-vous ?
Il fut une époque où je ne comprenais vraiment pas l'intérêt de Red Hat car j'y voyais une distribution payante avec très peu de logiciels disponibles dans les dépôts (même pas nginx) et des composants encore plus obsolètes que Debian. Et puis à force de voir son clone gratuit - la distribution communautaire CentOS - utilisé partout en entreprise j'ai enfin compris ce qui plaît :
- Le support de 10 ans (à une époque j'étais naïf, je pensais que les entreprises installaient rapidement les mises à jour et n'aimaient pas se traîner des vieux logiciels... en fait c'est tout l'inverse !)
- Les correctifs de sécurité backportés, ce qui permet de mettre à jour sans vraiment mettre à jour.
- L'écosystème logiciel et matériel, c'est rassurant d'avoir un contrôleur SCSI dont le driver est certifié Red Hat.
- SELinux (rires dans la salle).
Red Hat a toujours eu un modèle économique surprenant car d'un côté ils vendaient leur distribution commerciale (Red Hat Enterprise Linux - ou RHEL) et de l'autre ils sponsorisaient un clone gratuit (CentOS) identique au bug près (1:1 bug). Et pendant très longtemps, cela a permis à beaucoup de gens - particuliers et entreprises - de profiter de l'écosystème Red Hat - sans devoir payer un centime.
Phase 1 : sabordage de CentOS
Suite au rachat surprise de Red Hat par IBM en 2019, cette politique est en train de changer, et le message est clair : ils en ont marre des gens qui ne paient pas, il va falloir passer à la caisse. Ainsi l'ouverture des hostilités a commencé avec un changement de politique de CentOS :
- CentOS 8, qui devait suivre le cycle de RHEL 8, ne sera finalement pas supportée 10 ans mais à peine un an.
- CentOS n'a plus vocation à être un clone gratuit de RHEL mais sera un équivalent à "Windows Insider". Vous ne l'utiliserez plus pour profiter de la stabilité de Red Hat, mais pour tester les nouveautés en amont.
Ces changements ont sabordé l'intérêt même de CentOS et il n'a pas fallu longtemps avant de voir fleurir de nouveaux projets alternatifs avec pour objectif de fournir à nouveau un clone de RHEL gratuit : AlmaLinux, Rocky Linux, ou encore Oracle Linux qui existait déjà depuis presque 10 ans, mais en vrai personne n'aime Oracle et personne ne leur fait confiance :)
Phase 2 : blocage de l'accès aux sources
Là encore Red Hat ne voyait pas d'un bon œil la prolifération de clones gratuits de RHEL, ils décidèrent donc de réserver l'accès aux sources à leurs clients. Désormais, les seules sources publiques seront celles de CentOS, qui rappelons-le n'est plus la même chose que Red Hat. Or, les clones ont besoin des sources de RHEL, ce qui pose évidemment un problème.
Ce qui selon moi enfonce le clou, c'est ce communiqué de Red Hat de la part Mike McGrath, "Vice President of Core Platforms Engineering at Red Hat" (pas de traduction pour ne pas dire de bêtise). Le passage croustillant est :
I feel that much of the anger from our recent decision around the downstream sources comes from either those who do not want to pay for the time, effort and resources going into RHEL or those who want to repackage it for their own profit. This demand for RHEL code is disingenuous.
Voilà, les termes sont lâchés, ceux qui se plaignent seraient les gens qui ne paient pas. On est donc pas très loin d'une rhétorique anti open source, un retour 20 ans en arrière quand Linux était vu comme un truc d'illuminés et que l'informatique des gens sérieux c'était vendre des logiciels propriétaires en boite.
Alors oui, c'est leur droit, d'autant que le débat sur la manière de gagner de l'argent avec du logiciel gratuit est sans fin. Mais à partir du moment où Red Hat prend en otage du code source pour obliger les utilisateurs à passer à la caisse, c'est une pratique du monde propriétaire.
Red Hat est dans la légalité, dans son bon droit, mais les utilisateurs doivent comprendre que les choses n'iront pas en s'arrangeant, bien au contraire.
Conclusion
Dans mon article Le drame CentOS 8 je disais qu'il était urgent d'attendre que la situation se clarifie et qu'il ne fallait plus installer de CentOS 8. Aujourd'hui, la situation me paraît suffisamment claire : payez vos licences Red Hat ou partez chez Debian.
Il est illusoire de penser qu'il suffit de passer sous Alma ou Rocky pour résoudre le problème car l'avenir de ces distributions communautaires parait aujourd'hui incertain, d'autant que nous ne sommes pas à l'abri d'une nouvelle surprise de la part de Red Hat.
Faites des choix courageux, ne laissez pas pourrir vos infrastructures juste parce que vous n'avez pas le budget ou le temps pour vous en occuper. Ne prenez pas du CentOS juste pour avoir l'air d'un pro et affirmer fièrement à vos clients que vous travaillez avec du Red Hat. Ne croyez pas que faire les mises à jour dans 10 ans sera moins chiant que de les faire dans 5 ans, bien au contraire.
Si vous voulez rester dans la Red Hat family (CentOS, Rocky, Alma) faites-le pour de bonnes raisons. Ne restez pas volontairement prisonnier d'un écosystème qui ne veut plus de vous.
Liens
Quelque part en 2010
Les gens: le problème de Linux, c'est qu'il y a trop de choix, trop de distributions, on s'y perd, si les "développeurs" s'unissaient autour d'une solution commune, on pourrait concurrencer Windows.
Systemd: bonj...
Les gens: Fuuuuuuuuuu
De nos jours, en 2023
Les gens: Y'a trop de gestionnaires de packages: deb, rpm, docker, flatpak, snap...
Canonical: on va demander aux distributions dérivées de ne pas préinstaller flatpak car on préfère se focus sur snap.
Les gens: Fuuuuuuuuu
Avec beaucoup de retard, et alors que la mini-série Obi-Wan Kenobi démarre demain, je livre un court avis sur The book of Boba Fett que j'ai vu il y a quelques mois.
Alors que Disney a bien failli tuer la licence Star Wars avec sa postlogie misérable et inutile, force est de constater qu'ils s'en sortent beaucoup mieux au niveau des séries. Je dirais même qu'ils lui ont redonné un nouveau souffle avec The Mandalorian et que cela fait beaucoup de bien.
Malheureusement, les retours sur The book of Boba Fett sont beaucoup moins élogieux, ils sont même très partagés, parfois décevants. Mais si j'écris cet article c'est avant pour tout pour donner mon propre avis complètement subjectif.
Au tout début, la série m'a vraiment emballé. Même si je dois admettre que le personnage de Boba Fett en lui-même n'était pas passionnant, j'étais vraiment attiré par tout ce qu'il y avait autour. La ville de Mos Espa, le palais de Jabba le Hut, le Saarlacc... j'avais l'impression de voir un fork du début de Star Wars Episode VI, et je trouvais intéressant de mettre de côté les Jedi, la force, le bien et le mal, pour faire place à un bon petit western. La série introduisait de nombreux personnages, des intrigues politiques, des enjeux, du fan service (le chasseur Naboo), l'histoire des hommes des sables, bref le parfait cocktail pour attiser mon intérêt. Et là, c'est le drame.
C'est le drame oui, car au fur et à mesure des épisodes, les intrigues et les personnages ne sont jamais développés, ne mènent nulle part ou ne servent à rien. Boba Fett est... un gentil. On comprend rapidement que sa motivation pour prendre la suite de Jabba et devenir un seigneur du crime, est de faire le bien, c'est tout. Fennec ne sert à rien, 90% des personnages introduits dans les premiers épisodes passeront à la trappe. Et puis il y a l'épisode de trop.
La série décide en plein milieu de revenir sur les aventures du Mandalorien, comme si elle oubliait qu'elle était censée raconter l'histoire de Boba Fett, mais il y a pire. Pire oui, car un des épisodes remet à l'honneur Grogou et Luke Skywalker.
L'apparition de Luke Skywalker en Deus Ex Machina à la fin du Mandalorian était un moment épique qui a fait couler pas mal de larmes des yeux des fan. Mais la séquence était courte et se suffisait à elle-même, le personnage n'avait pas vraiment de dialogue, c'était presque un caméo, il n'en fallait pas plus. Or la série Boba Fett nous offre un épisode complet où Luke en CGI réapparaît, a des dialogues, et nous montre qu'il est devenu un Jedi chiant et dogmatique comme ceux de la prélogie. C'était vraiment l'épisode de trop, foutez la paix à Luke Skywalker, laissez ce personnage vivre dans le cœur des fans, n'essayez pas de lui écrire une nouvelle histoire, ça ne marche pas.
Alors que mon intérêt pour cette série était au plus bas et que je songeais même à arrêter de regarder, la fin se profilait déjà à l'horizon. Et même si elle confirme qu'aucune intrigue, aucun personnage n'a d'importance dans la série, elle a le mérite de nous offrir une ultime bataille divertissante. Finalement mon intérêt pour cette série aura été une courbe en parabole, c'est à dire en forme de U, mais cela n'aura pas suffit à me convaincre.
Pour conclure, je ne peux que me ranger à l'avis général: The Book of Boba Fett était une série décevante qui souffrait de gros problèmes d'écriture. Je reproche à la postlogie d'être faite par des gens qui ne connaissent rien à Star Wars, The Book of Boba Fett en est un peu l'antimatière: elle a été faite par des gens qui connaissent très bien Star Wars, mais qui ont échoué à écrire une histoire consistante.
Je compte beaucoup sur la série Obi-Wan Kenobi pour relever le niveau, et je serais devant mon PC le 27 Mai.
Vous n'êtes sans doutes pas passé à côté de cette information : YouTube supprime le compteur des dislikes pour lutter contre le harcèlement. Le but est d'encourager les jeunes créateurs de contenus, en leur épargnant de se faire harcler par marées de pouces rouges. LOL.
C'est une mauvaise décision, et je vais essayer d'exprimer mon point de vue sans parler de Cancel culture car d'une part ce n'est pas mon intention, et d'autre part je pense que le but n'est pas réellement de protéger les créateurs, mais les intérêts des partenaires.
Tout d'abord, YouTube semble amalgamer les pouces rouges avec le harcèlement. S'il est vrai qu'une vague massive de dislikes peuvent avoir pour objectif de porter atteinte à une personne ou à une marque (voir Review bomb), c'est un phénomène très marginal, et plutôt dirigé envers les entreprises. Sony en a fait les frais avec son trailer Ghostbusters 2016 ou avec la première version du design de Sonic the Hedgehog sorti en 2020.
Ensuite, si le but est vraiment de protéger les créateurs du harcèlement, alors je pense que c'est une mauvaise décision, car sans le compteur de dislikes, les spectateurs iront poster des commentaires à la place pour exprimer leur opinion. A mon sens, un commentaire agressif est infiniment plus blessant qu'un pouce rouge. Et le pire dans tout cela, c'est que les créateurs voient toujours les dislikes dans leurs statistiques, ils ne sont justes plus affichés publiquement, donc le prétexte tombe complètement à plat.
Je ne considère pas les dislikes comme un outil de harcèlement, le but est simplement de donner un avis sur la qualité d'une vidéo, c'est une sorte de vote, et c'est très utile. Par exemple lorsque je recherche des tutoriels pour du bricolage, la note de la vidéo me permet de voir si l'auteur dispense de bonnes pratiques, ou si au contraire il n'y connaît pas grand chose. C'est donc pour moi une fonctionnalité importante de la plateforme qui disparaît.
Au final cette décision est une fausse solution à un problème qui n'en est pas un. La plateforme est gangrenée par des problèmes bien plus graves, en premier plan la rémunération des vidéastes. Si vous voyez de la publicité pour NordVPN ou RAID Shadow Legends dans toutes les vidéo, c'est parce qu'il est devenu quasi impossible d'être rémunéré par YouTube. Fred de l'émission Joueur du Grenier explique par exemple que le simple fait d'avoir utilisé "le rire" de Michael Jackson (Thriller) a suffit pour Claim une de leurs vidéos. Le Claim, c'est quand un ayant droit s’accapare la totalité de la rémunération de votre vidéo, sous prétexte que vous utilisez un élément soumis aux droits d'auteurs. Même si vous utilisez un extrait qui dure 2 secondes, même si la loi française l'autorise (exceptions au droit d'auteur), c'est une entreprise qui touchera la totalité des revenus de la vidéo pour laquelle vous avez travaillé.
Pour conclure, cette décision unilatérale de retirer l'affichage des Dislikes est représentative de la politique désastreuse de la plateforme. Si vous voulez protester :
- Faites-le savoir sur l'annonce officielle (aucun scrupule à review bomb quand c'est une société qui de toutes manières n'a rien à craindre)
- Installez uBlock Origin, coupez les vannes de la publicité qui ne sert qu'à rémunérer les ayants droits. Les vidéastes ne touchent déjà plus rien de toutes manières.
- Demandez à vos vidéastes préférés d'aller sur d'autres plateformes, au moins en secondaire. Ils se plaignent sans arrêt de Youtube mais refusent d'aller voir ailleurs, par peur de perdre des vues ou de froisser leurs sponsors. Motivez-les.
Et c'est malheureusement tout ce que nous pouvons faire pour le moment. La plateforme jouit d'un monopole complet et n'a aucune concurrence. La télévision 3.0 est déjà là, et ce n'est pas une bonne chose.
EDIT: grâce à l'extension "Return YouTube Dislike" on peut voir le vrai score de l'annonce officielle au 05/12/2021, et ça montre à quel point les utilisateurs sont mécontents :
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