Je suis tombé sur ça :
D'une part je suis curieux de savoir d'où ils tiennent cette information, est-ce qu'ils ont fait un sondage ?
D'autre part, si je raisonne en bon spectateur lobotomisé par BFMTV, voici ce que je suis censé comprendre :
- Telegram n'est pas surveillé
- Les terroristes utilisent Telegram
- Donc il faut surveiller Telegram pour arrêter le terrorisme
Et, par extension :
- Les gens qui ont des choses à se reprocher ne veulent pas être surveillés
- Les gens qui n'ont rien à se reprocher acceptent d'être surveillés
- Donc, si je refuse la surveillance, c'est que j'ai des choses à me reprocher
Ce raisonnement s'appelle un syllogisme et ce n'est pas de la logique, c'est un paralogisme. Et ça mène à des choses absurdes, comme le dit Wikipédia :
Tous les humains sont mortels. (A ⇒ B)
Un âne est mortel. (C ⇒ B)
Donc un âne est un humain. (C ⇒ A)
Et voilà commenter démonter un faux raisonnement avec un peu d'intelligence.
Il se trouve que l'article a le bon goût de nous rappeler que Telegram a été créé par deux russes qui ne voulaient pas être surveillés par leur gouvernement et que leur logiciel est utilisé par des dissidents sous dictature mais aussi par des hommes politiques qui ont besoin de confidentialité, ou simplement par les journalistes qui veulent garantir l'anonymat de leurs sources, donc au final le chiffrement ne profite pas qu'aux criminels.
Faut-il donc y voir le travail d'un journaliste qui a essayé de faire correctement son boulot mais qui a du se résoudre à présenter un titre putaclick pour rester dans la ligne éditoriale du journal ? S'agit-il d'un exemple de manipulation de l'information ? Le prochain responsable de tous les maux de la planète sera-t-il... le chiffrement lui-même ?
Seafile est un concurrent à Dropbox, l'entreprise développe un logiciel permettant de synchroniser vos fichiers dans le cloud. Ce qui est bien c'est que la partie serveur et client sont libres, vous pouvez donc les installer chez vous (il existe d'ailleurs une app pour Yunohost).
Mais Seafile propose aussi des services Cloud payants et parmi les moyens de paiement disponibles il y avait Paypal. Mais tout ça c'est fini car dans ce billet Seafile nous livre quelques informations croustillantes :
From Sunday June 19th 2016 we are no longer allowed to accept payments via PayPal. PayPal has demanded that we monitor data traffic as well as all our customers’ files for illegal content. They have also asked us to provide them with detailed statistics about the files types of our customers sync and share on https://app.seafile.de.
Ce qui se traduit par :
Depuis le Dimanche 19 Juin 2016, nous ne sommes plus autorisés à accepter les paiements via PayPal. PayPal a exigé que nous surveillions le traffic ainsi que les fichiers de nos utilisateurs à la recherche de contenu illégal. Ils nous ont aussi demandé de leur fournir des statistiques détaillées à propos des types de fichiers que nos clients synchronisent et partagent sur https://app.seafile.de.
Seafile a refusé en expliquant que ce n'était pas conforme aux lois allemandes et européennes relatives à la protection des données et pas très éthique non plus. Par conséquent PayPal ne veut plus travailler avec eux et leur demande de retirer toute mention de cette marque sur leur site.
Merci Seafile pour votre transparence et votre honnêteté :)
Quant à PayPal, no comment, ce serait tirer sur l'ambulance.
Avec quelques jours de retard, je livre aussi mes réactions sur le déchiffrement de l'iPhone par le FBI. En résumé ils ont été contactés par une entreprise (dont le nom n'a pas été révélé) qui leur a "vendu" les détails d'une faille permettant de casser ou contourner la sécurité de l'appareil. Donc le FBI a accès aux données et n'a plus besoin de Apple. Beaucoup de gens y voient donc l'échec de la firme à la pomme car le système ne serait pas infaillible.
Et pourtant c'est faux, cela prouve encore une fois qu'on se focalise sur cette affaire bien précise alors que l'enjeu c'est le chiffrement. Apple n'a jamais voulu défendre un terroriste, ni même bloquer une enquête du FBI par plaisir. Non, leur but était de préserver leur système de chiffrement en refusant de l'affaiblir car cela aurait eu des conséquences néfastes pour tout le monde.
Le fait que le chiffrement ait été cassé/contourné n'est pas une première : les failles ça existe depuis toujours, sur tous les systèmes. Le fait que le FBI en ait acheté une prouve d'ailleurs que c'est un véritable business. Il est probable que le mystérieux interlocuteur connaissait cette faille depuis longtemps et attendait de la vendre au plus offrant.
La pression est donc retombée mais il est peu probable que cette affaire soit terminée pour autant. Attendons de voir la suite.
Tout le monde connaît l'histoire : le FBI détient un iPhone ayant appartenu à un terroriste mort mais l'appareil est tellement bien chiffré que Apple a été sollicité pour contourner les protections, ce qu'ils refusent de faire. Résumé un peu plus complet ici.
Il y a d'abord deux choses qui me gênent dans cette affaire :
- Le FBI part du principe que toutes les réponses à l'enquête sont dans l'iPhone alors qu'ils n'en savent rien. C'est une facilité bien entendu qui sert leur argumentation : "c'est le chiffrement qui bloque l'enquête".
- Le FBI sous-entend que Apple détient les clés pour déverrouiller son appareil, or ce n'est pas le cas. Un fabriquant de coffres fort ne peut pas ouvrir les coffres de ses clients. Ce que peut faire Apple c'est de modifier son système de chiffrement pour l'affaiblir ou ajouter une backdoor mais nous y reviendrons.
Tout le monde est d'accord pour lutter contre le terrorisme ou pour aider une enquête à avancer. Mais les enjeux sont plus importants car le nerf de la guerre ici est le chiffrement. Beaucoup de gens ne voient pas à quel point les smartphones et ordinateurs sont des objets intimes, on y stocke notre vie, nos photos, nos documents administratifs, nos mots de passes, nos contacts, nos conversations privées et notre porn. Ouvrir l'accès à quelqu'un n'est pas anodin, c'est comme donner les clés de sa maison ! Donc non l'informatique ce n'est pas juste des gadget pour lequels on fait tout un fromage, on joue gros.
Si Apple affaiblit son système ou ajoute une backdoor, en autorisant par exemple une clé dont seul le FBI serait en possession, ils ouvront alors la boîte de pandore avec de nombreuses dérives à prévoir :
- Les vrais criminels iront vers un autre système de chiffrement que celui de Apple, le problème sera alors déplacé.
- Le FBI ne se limitera pas à des affaires de terrorisme et le périmètre s'élargira petit à petit. Prenons pour exemple la France qui a instauré le blocage administratif des sites internet, au début c'était juste pour la pédophilie mais aujourd'hui cela est étendu au terrorisme, à la FDJ, au piratage, et des projets sont en cours pour aller encore plus loin (par exemple les sites injurieux envers les élus, elle est belle la liberté d'expression). On peut extrapoler qu'un jour le FBI déchiffrera des iPhones pour de simples contrôles fiscaux.
- Il n'est plus à prouver que la NSA pratique l'espionnage de masse dans son propre pays et aussi dans les autres. Ils demanderont obligatoirement eux aussi l'accès à la backdoor Apple afin d'écouter et collecter - en dehors de tout enquête officielle et sans autorisation d'un juge - les données de tout le monde.
- D'autres pays demanderont la même chose à Apple, et pas forcément des démocraties. Si c'était la Chine ou l'Iran qui avait demandé à Apple de déverrouiller l'iPhone, l'affaire aurait certainement été présentée d'une autre manière par les media.
- La backdoor sera obligatoirement exploitée par d'autres personnes. Le jour où des pirates trouveront le moyen d'y accéder, les données des utilisateurs se retrouveront dans la nature.
Une fois de plus, le terrorisme est un prétexte en or pour inciter les gens à abandonner leurs libertés. Si la génération actuelle ne s'en rend pas compte, c'est celle d'après qui en paiera le prix. Je ne peux que soutenir la démarche de Apple qui a les couilles et les moyens de résister car ils ont raison, mais ça nous le réaliserons probablement trop tard.